Que signifie exactement le terme « frontière »? Par définition, il s’agit d’une simple limite qui détermine l’étendue d’un territoire ou qui sépare deux États. La frontière est alors une barrière, une borne ou une démarcation, très visible sur les cartes géographiques et les atlas de ce monde. Elle peut être naturelle, à l’image du cours d’eau ou de la chaîne de montagnes qui sépare deux pays, ou artificielle, conclue par un traité entre deux nations. En élargissant le concept, la frontière devient plurielle et délimite non seulement un territoire, mais toutes choses qui diffèrent ou qui s’opposent. Ainsi, les frontières se veulent à la fois territoriales et politiques, culturelles et linguistiques, sociales et économiques. Certains conçoivent même des frontières symboliques, identitaires, voire imaginaires…
Cette exposition vous invite à explorer les différentes frontières qui mettent en relief l’originalité et la diversité du Canada français, en puisant dans quarante fonds d’archives d’organismes et d’individus franco-canadiens, conservés au Centre de recherche en civilisation canadienne-française de l’Université d’Ottawa. Afin de pérenniser leur mémoire, ces organismes et ces individus ont choisi de confier leur patrimoine documentaire au CRCCF. La réception d’un document aux archives représente en soi la traversée d’une frontière, soit le passage de sa vie active à sa vie historique. Le CRCCF devient ainsi un véritable lieu frontalier. Appelées aujourd’hui à raconter leur histoire, les archives traversent le temps pour venir à notre rencontre et tracent une ligne entre ce qui constitue le passé – ce dont elles témoignent – et le présent, d’où nous les interprétons.
Sillonnez dix frontières par l’entremise de plus d’une centaine de documents d’archives:
- Frontière naturelle
- Frontière politique
- Frontière sexuelle
- Frontière religieuse
- Frontière spatiale
- Frontière temporelle
- Frontière générationnelle
- Frontière culturelle
- Frontière linguistique
- Frontière artistique
1. Frontière naturelle: Les rivières de la région
Dans la région de la capitale nationale, la rivière des Outaouais, la rivière Gatineau et la rivière Rideau ont longtemps joué un rôle de frontière géographique entre les différents villages environnants ou entre les différents quartiers d’une même ville. Paraissant souvent infranchissables, ces obstacles fluviaux ont toutefois largement contribué au développement économique de la région –notamment pour l’industrie forestière – en permettant la drave et la construction de barrages hydroélectriques. Confrontés à ces barrières naturelles, les Canadiens se sont montrés particulièrement ingénieux, comme le démontre la construction du canal Rideau.
Afin de relier plus facilement Montréal et les Grands Lacs, l’un des plus imposants chantiers de construction de l’époque est entrepris entre 1827 et 1832 par le colonel John By à Ottawa. S’étirant sur 202 kilomètres, avec 47 écluses, il a sollicité le labeur de 6 000 travailleurs, en majorité Canadiens français. À cette époque, le bateau est roi et les traversiers abondent pour franchir les cours d’eau. À partir de la fin du XIXe siècle, plusieurs ponts seront cependant construits pour relier plus facilement la province de Québec et celle de l’Ontario : le pont des Chaudières (1828), le pont ferroviaire Prince de Galles (1880), le pont Alexandra (1901), le pont Champlain (1928), le pont Macdonald-Cartier (1965) et le pont du Portage (1973). Si l’homme a toujours tenté de maîtriser les rivières, les crues printanières d’hier comme d’aujourd’hui lui rappellent toutefois sa propre fragilité.
2. Frontière politique: Des fonctionnaires canadiens à l’étranger
Chaque jour, des milliers de fonctionnaires québécois et ontariens traversent la rivière des Outaouais pour se rendre dans les édifices fédéraux, à Ottawa ou à Hull. Avec une touche de sarcasme, l’écrivain Jules Tremblay les prend d’ailleurs comme sujets dans son poème « Les bonzes », rédigé au début du XXe siècle. S’ils se concentrent dans la région de la capitale nationale, plusieurs d’entre eux ont aussi franchi les frontières nationales pour rejoindre les ambassades canadiennes, implantées outre-mer depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale. À l’époque, le Canada souhaite contribuer à l’édification et au maintien du nouvel ordre mondial.
Cuba devient ainsi le premier pays des Antilles où le Canada établit une mission diplomatique. L’écrivain et historien Émile Vaillancourt est choisi pour occuper le premier poste de ministre d’état du Canada à Cuba. De 1945 à 1946, Georgette Lamoureux, une jeune ottavienne de 35 ans, est secrétaire et agente d’information à la légation canadienne à La Havane. Sa correspondance et ses journaux de voyage éclairent la vie quotidienne d’une fonctionnaire canadienne en terre étrangère.
Le Canada dispose également de représentants en Europe comme en Afrique. Le journaliste de renom Fulgence Charpentier est ainsi nommé conseiller culturel à l’ambassade du Canada à Paris, de 1948 à 1953, avant de devenir chargé d’affaires en Uruguay, au Brésil et en Haïti. En 1962, il devient le premier ambassadeur du Canada en Afrique francophone. Grâce à lui, le Canada tisse ses premiers liens diplomatiques avec ce continent.
3. Frontière sexuelle: Des femmes dans un monde d’hommes
Tout au long du XIXe siècle, et durant les premières décennies du XXe siècle, les Canadiennes françaises étaient d’abord élevées et éduquées pour devenir de bonnes mères au foyer. Les métiers leur étant offerts étaient alors très restreints, hormis les vocations de religieuses, d’institutrices ou d’infirmières. La Franco-Ontarienne Simone Gamache – sœur Charles-Auguste en religion – prononce ainsi ses vœux chez les Sœurs de la Charité d’Ottawa en 1930, pour se lancer dans une carrière en enseignement qui durera quarante ans. À l’époque, les femmes s’organisent surtout autour de leur paroisse et de diverses associations religieuses. La Fédération des femmes canadiennes-françaises, fondée en 1914 par Almanda Walker-Marchand, est le premier regroupement laïc de femmes qui, encore aujourd’hui, vient en aide à diverses œuvres et promeut l’action des femmes francophones.
À partir de 1918, alors que les Canadiennes obtiennent le droit de vote, leur désir d’émancipation s’affermit. La journaliste Emma Montmarquet-Daoust, qui a longtemps publié des causeries féminines dans le journal Le Droit sous le nom de plume d’Esther, remet d’ailleurs en question ces bouleversements du monde moderne dans l’un de ses billets. La Seconde Guerre mondiale viendra toutefois confirmer la nouvelle place des femmes dans la société canadienne, grâce à leur participation à l’effort de guerre. L’un des exemples les plus frappants est celui de Margaret Brown. Premier membre de la section féminine du Corps d’aviation royal du Canada à exercer les fonctions d’officier préposé aux renseignements, elle sera la première femme à interroger un équipage à la suite d’un raid sur l’Allemagne.
Les femmes montent aux barricades!
Dans les années 1970 et 1980, de nombreuses femmes sont actives au sein de mouvements de protestation et de revendications. Elles manifestent pour mettre fin aux violences sexuelles, pour garantir le droit à l’avortement, pour obtenir une représentation équitable ou encore pour avoir accès à une éducation supérieure. La marche « La nuit, la rue, femmes sans peur » en est un bon exemple. Depuis les années 1980, le Centre d’aide et de lutte contre les agressions sexuelles de l’Outaouais organise l’événement; l’espace d’une nuit, les femmes prennent d’assaut les rues de leur ville afin de protester contre les agressions sexuelles et le harcèlement.
Sur la scène politique, les femmes sont également beaucoup plus présentes depuis la fin des années 1970. À cet égard, la carrière de la Québécoise Renaude Lapointe mérite d’être mentionnée. Nommée au Sénat par Pierre Elliott Trudeau en 1971, elle devient la première francophone à occuper les fonctions de Présidente de la Chambre haute de 1974 à 1979. Dans le milieu communautaire, les femmes vont également s’investir pour protéger leur culture et leur langue, alors que les réseaux paroissiaux s’étiolent et que les lieux de regroupement se font plus rares. En 1984, Rolande Faucher et son équipe parviennent à mettre sur pied un centre culturel pour le Mouvement d’implication francophone d’Orléans, en sollicitant sans relâche la ville de Gloucester pour l’obtention des fonds nécessaires.
4. Frontière religieuse: L’Église catholique en mission
L’apport des communautés religieuses, tant féminines que masculines, dans l’implantation et le développement de communautés catholiques francophones à travers l’Amérique est remarquable. Les Oblats, entre autres, ont largement servi la cause en Ontario, mais aussi dans l’Ouest canadien. Fondée en France en 1816, la communauté des Oblats de Marie-Immaculée s’établit au Canada le 2 décembre 1841 et en Ontario, en janvier 1844. Le supérieur de la communauté au Canada, Mgr Joseph-Eugène Guigues, devient en 1847 le premier évêque du diocèse de Bytown, aujourd’hui Ottawa. Devant les bancs bondés de la cathédrale Notre-Dame, il demandera à l’architecte Joseph-Pierre LeCourt de construire l’église Sainte-Anne en 1873.
À la fin du XIXe siècle et au début du XXe, les missionnaires oblats sillonnent le Sud, puis le Nord ontarien, pour ensuite se déplacer dans l’Ouest canadien. En 1899, le père oblat Adrien-Gabriel Morice est missionnaire dans la région du lac Stuart, en Colombie-Britannique. Procédant à un voyage d’exploration, il repoussera les frontières des missions catholiques jusqu’à l’Océan Pacifique. La Congrégation des Sœurs des Saints Noms de Jésus et de Marie, fondée à Longueuil en 1843, s’emploie quant à elle à l’enseignement et à l’instruction des jeunes filles, d’abord au Québec, puis aux États-Unis, en Ontario et au Manitoba. Sœur Marie-Édouard, née Odile Chicoine, la rejoint en 1866; elle sera missionnaire en Oregon jusqu’à son décès, en 1915.
5. Frontière spatiale: La conquête de nouveaux territoires
Au XIXe siècle, les Canadiens n’ont de cesse de repousser les frontières de leur pays en colonisant de nouveaux territoires. Le train a été le moteur premier de cette expansion et symbolise incontestablement cette mythique conquête de l’Ouest. Dans les années 1880, le chemin de fer Canadien Pacifique propose ainsi d’établir un lien entre l’Ouest et l’Est canadien, pour faciliter la colonisation des prairies, alors peu peuplées. En 1906, suivant le train, plusieurs Français et Canadiens français s’établissent à Dumas, malgré une nette majorité anglophone dans la province de la Saskatchewan. Baptisé en l’honneur du célèbre romancier français Alexandre Dumas, ce village agricole compte en 1940 une centaine d’habitants. Malheureusement, l’abandon du train mènera peu à peu à la disparition de cette communauté.
Dans les années 1980, le Canada se tourne vers une autre frontière, cette fois-ci beaucoup plus lointaine. Si la conquête de l’espace débute à la fin des années 1950 avec les Russes et les États-Uniens, le Canada emboîte le pas dès 1984, en envoyant son premier astronaute, Marc Garneau, dans l’espace. En 1999, ce sera au tour de Julie Payette d’être la première astronaute canadienne à entrer dans la Station spatiale internationale. Le journal Le Droit possède des clichés très révélateurs de l’intérêt de la population envers ces astronautes. La Voie lactée devient également source d’inspiration pour les auteurs d’ici. L’écrivain de science-fiction Jean-Louis Trudel, astronome de formation, situe ainsi l’action de ses romans jeunesse dans cet espace intergalactique.
6. Frontière temporelle: Du baptême à la tombe
Le temps qui passe balise également notre propre existence, de notre naissance jusqu’à notre mort. Le calendrier demeure ainsi un témoin incontestable de ces années et de ces mois qui défilent devant nous, marquant les grands événements de notre vie. Les fonds d’archives regorgent de photographies de jeunes enfants et de baptêmes, célébrant la naissance et la vie. Peu de documents, cependant, illustrent les décès et les enterrements, une fin pourtant incontournable. Pour bien des artistes, la Grande Faucheuse a d’ailleurs été une source d’inspiration fructueuse. Elle est notamment bien présente dans le manuscrit Le corbillard de l’écrivain Rodolphe Girard, qui sera publié dans le roman Rédemption en 1906. Girard y raconte l’histoire d’un jeune homme qui accompagne, seul, son amante à sa tombe.
7. Frontière générationnelle: Les âges de la vie
Le passage à l’âge adulte a souvent été considéré comme une frontière, un passage obligé, vécu et célébré différemment selon la culture et l’époque. Au XIXe siècle, en pleine industrialisation, il était courant de faire travailler les enfants dès l’âge de sept ans pour les faire contribuer au revenu familial. Un vent de réforme sociale souffle toutefois sur le Canada dès le tournant du XXe siècle; on tente alors d’interdire le travail des enfants – ce qui sera fait en 1929 – et de contraindre les parents à inscrire leurs enfants à l’école. Si la scolarisation des enfants de 8 à 14 ans devient obligatoire en Ontario en 1891, elle suscite encore bien des inquiétudes dans les années 1930 et 1940.
En 1938, le directeur de l’enseignement français au ministère de l’Éducation de l’Ontario, Robert Gauthier, mettra sur pied un concours provincial de français pour contrer le décrochage scolaire et stimuler la poursuite des études aux niveaux secondaire et universitaire. Le concours a d’ailleurs encore lieu aujourd’hui, sous une formule différente. Par ailleurs, dans les années 1960-1970, alors que la société canadienne s’ouvre à la consommation et aux loisirs, les camps de vacances pour les enfants deviennent très populaires. Le Club Richelieu d’Ottawa avait ainsi l’habitude de louer une ferme durant l’été pour permettre aux enfants d’aller passer des vacances à la campagne.
8. Frontière culturelle: Être francophone en contexte minoritaire
La frontière devient culturelle lorsqu’elle sépare deux aires où les traditions, les coutumes et les langues diffèrent. Elle se ressent entre autres en Acadie, près des États-Unis ou dans les communautés francophones hors Québec. L’histoire a souvent démontré que cette frontière peut être très poreuse, comme ce fut le cas lors de l’exode des Canadiens français en Nouvelle-Angleterre au XIXe et au début du XXe siècle. Devant la pénurie de terres agricoles, près d’un million d’agriculteurs canadiens-français vont migrer vers les villes manufacturières du Maine, du Vermont, du New Hampshire et du Massachusetts, entre 1840 et 1930. De vastes réseaux vont se mettre en place pour les aider dans ce périple. Arrivés sur place, les nouveaux venus s’intègrent dans des quartiers surnommés les «Petits Canada », où la langue française et la religion catholique sont maîtres.
Pour un francophone né hors Québec, il est aussi possible de ressentir une frontière culturelle au sein même du Canada. À partir des années 1960, alors que le Québec entame sa Révolution tranquille, le concept identitaire du Canadien français éclate. Une pluralité d’identités va apparaître: Québécois, Franco-Ontariens, Franco-Manitobains, Fransaskois, Franco-Albertains, Franco-Colombiens, Franco-Yukonais, Franco-Ténois. La caricature du journal Le Droit de Daniel McKale, publiée à la fin des années 1970, dévoile bien les frontières culturelles et identitaires qui existent au Canada et qui sont encore d’actualité.
Être autochtone au Canada
Dans l’histoire canadienne, les Premières Nations sont sans contredit le groupe qui demeure le moins documenté. Dans ces cultures où prime la tradition orale, peu de sources écrites ont subsisté pour renseigner les chercheurs sur leur passé. Malgré cela, bien des documents, produits par des missionnaires, des voyageurs ou des scientifiques, discourent sur leur mode de vie, leur histoire et leur développement. Il s’agit toutefois de sources extérieures, étrangères aux communautés autochtones, qui ont longtemps eu des visées colonisatrices ou assimilatrices. Pour étudier les Premières Nations, il est essentiel de garder à l’esprit que le regard d’autrui est souvent voilé ou biaisé par des perceptions et des jugements, voire par des préjugés, qui embellissent ou déforment la réalité.
9. Frontière linguistique: Les écoles séparées et le Règlement 17
À partir des années 1850-1860, un réseau d’écoles confessionnelles séparées est institué en Ontario, parallèlement à un réseau d’écoles publiques laïques. Des écoles protestantes et des écoles catholiques, francophones et anglophones, évoluent donc sur le même territoire. Un modèle semblable est adopté ailleurs au Canada, notamment au Manitoba. Le système des écoles séparées suscite cependant beaucoup de protestations de la part des anglophones, pour qui l’usage du français dans les écoles de l’Ontario est perçu comme une menace. C’est pourquoi le gouvernement ontarien adopte le Règlement 17 en 1912, qui limite l’enseignement du français et son usage comme langue de communication aux deux premières années du primaire, le temps pour ceux qui ignorent l’anglais d’en apprendre les bases. Les Franco-Ontariens s’organisent alors pour sauver leurs droits scolaires.
Fondée en 1910, l’Association canadienne-française d’éducation d’Ontario (ACFEO) prend la tête du mouvement. La consigne du Conseil des écoles séparées d’Ottawa (CESO) est de continuer à enseigner en français. Le ministère de l’Éducation de l’Ontario réplique en menaçant de représailles les commissions scolaires et les enseignants. De 1916 à 1927, la lutte pour les droits scolaires des francophones s’accentue. En 1925, le premier ministre conservateur de l’Ontario, Howard Ferguson, ouvre une commission d’enquête pour mettre fin à la crise scolaire. En 1927, à la suite du dépôt du rapport de la commission Scott-Merchant-Côté, qui révélait que la réussite dans l’apprentissage de l’anglais devait commencer par l’enseignement de la langue maternelle, le gouvernement ontarien établit un système d’écoles primaires bilingues où le français devient la principale langue d’enseignement. Le Règlement 17 ne disparaîtra des statuts de la province qu’en 1944.
Les luttes franco-ontariennes
À la suite de la Commission royale d’enquête sur le bilinguisme et le biculturalisme, l’Ontario s’engage, dès 1967, à offrir davantage de services à sa population francophone. Les réformes tardent cependant à venir et la communauté franco-ontarienne s’engage dans un mouvement de désobéissance civile. Le mouvement « C’est l’temps » voit ainsi le jour en 1975. Ses membres refusent de payer des contraventions ou de remplir des formulaires rédigés uniquement en anglais. Si toute la province est bientôt gagnée par cette action collective, il faudra toutefois attendre la Loi sur les services en français, en 1986, pour que les ministères et organismes gouvernementaux soient tenus d’offrir des services bilingues dans plus d’une vingtaine de régions désignées. Les Franco-Ontariens ne sont toutefois pas au bout de leurs peines…
Le 24 février 1997, le gouvernement conservateur de Mike Harris annonce la fermeture du seul hôpital qui offre une formation universitaire de langue française en Ontario. Le groupe SOS Montfort organise alors de multiples manifestations et pétitions pour gagner l’opinion publique. Au mois de mars, une grande manifestation de 10 000 personnes a lieu à Ottawa. Devant l’entêtement du gouvernement, la cause sera portée devant les tribunaux. Les Franco-Ontariens auront finalement gain de cause en décembre 1999, confortés en cour d’appel en décembre 2001.
L’adoption d’un drapeau franco-ontarien en 1975 symbolise bien la frontière linguistique et culturelle qui existe en Ontario. Les différentes luttes qu’ont menées les Franco-Ontariens durant les années 1970, 1980 et 1990 témoignent quant à elles du manque de visibilité et de légitimité dont ont longtemps souffert les communautés francophones minoritaires en Ontario et dans le reste du Canada.
10. Frontière artistique: Écrire en Ontario français
La création de la Coopérative des artistes du Nouvel-Ontario (CANO) au début des années 1970 marque un tournant dans l’histoire de la littérature franco-ontarienne. Jusqu’alors tournée vers les romans et les poèmes canadiens-français, majoritairement québécois, la scène artistique en Ontario français verra apparaître de nouveaux auteurs, comme Patrice Desbiens et Jean Marc Dalpé, forts d’une culture et d’un langage bien à eux. De nouvelles maisons d’édition, consacrées à la publication d’oeuvres franco-ontariennes, verront également le jour, dont la première, les Éditions Prise de parole, en 1973.
En 1994, le gouvernement de l’Ontario reconnaîtra d’ailleurs l’importance de la littérature franco-ontarienne en créant le Prix littéraire Trillium. Naviguant entre Hull, Ottawa et le Nord de l’Ontario, les écrits de Pierre-Raphaël Pelletier, de Daniel Poliquin et de Gaston Tremblay permettent ainsi à tous ceux qui se définissent comme Franco-Ontariens de se forger une identité bien distincte à travers une littérature qui cherche avant tout à mettre à l’avant-plan la réalité franco-ontarienne, et dont l’originalité et la créativité ne cessent de se renouveler.
Les Franco-Ontariens montent sur scène
En 1970-1971, la troupe universitaire de l’Université Laurentienne à Sudbury met en scène la création collective « Moé j’viens du Nord ’stie », qui partira en tournée dans le Nord de l’Ontario. Jouée en pleine «révolution culturelle » franco-ontarienne, la pièce se veut le miroir de la réalité des francophones de l’Ontario de l’époque. Devant le succès de la pièce, certains des étudiants et chargés de cours – dont André Paiement, Pierre Bélanger et Robert Paquette – décident de créer le Théâtre du Nouvel-Ontario (TNO) en 1971.
Donnant naissance au théâtre franco-ontarien de création, le TNO deviendra le modèle dont s’inspireront les autres troupes créées au cours de la décennie. L’idée de promouvoir l’identité franco-ontarienne et de s’exprimer dans un vernaculaire dit franco-ontarien sera ainsi reprise par Théâtre Action en 1972 et le Théâtre d’la Corvée en 1975. André Paiement est considéré par plusieurs comme le père de la dramaturgie franco-ontarienne et son oeuvre a modelé la majeure partie des pièces théâtrales des années 1980 et 1990, dont celles de Michel Ouellette.
À propos de l’exposition virtuelle « Les archives du Canada français, d’une frontière à l’autre »
L’exposition virtuelle « Les archives du Canada français, d’une frontière à l’autre » est une production du Centre de recherche en civilisation canadienne-française (CRCCF) de l’Université d’Ottawa.
Crédits
- Recherche, rédaction et conception: Geneviève Piché, responsable des archives, CRCCF
- Coordination: Geneviève Piché, responsable des archives, CRCCF; Anne Mauthès, agente administrative, CRCCF
- Recherche de l’iconographie: Geneviève Piché, responsable des archives CRCCF; Alice Cocunubova, archiviste à la référence, CRCCF; Ghislain Thibault, archiviste informatique documentaire, CRCCF; Marysol Moran, archiviste audiovisuel et photographies, CRCCF
- Révision des textes: Olivier Lagueux, responsable des publications et de la recherche, CRCCF
- Graphisme: Maryne Bélanger
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